Simon Van Vliet, nouveau président de l’AJIQ

Après un an de vacance de la présidence, il y a de nouveau quelqu’un à la tête de l’AJIQ. Actif sur le conseil d’administration depuis plusieurs années et vice-président depuis un an, Simon Van Vliet prend les rênes de l’association représentant les journalistes pigistes du Québec à quelques semaines des Grands-Prix du journalisme indépendant (GPJI) et alors que, sur fond de crise dans l’industrie des médias, les défis restent immenses.

Par Hélène Roulot-Ganzmann @roulotganzmann

Continuité et renouveau au conseil d’administration de l’AJIQ élu hier soir à l’occasion de l’Association générale annuelle. Continuité parce que nouveau président, Simon VCBjOekJVIAAczNjan Vliet n’est autre que l’un des deux vice-présidents sortants, le porte-parole et celui qui a porté la plupart des dossiers politiques et juridiques durant les douze derniers mois, et que la quasi totalité du CA est reconduit dans ses fonctions. Renouveau parce qu’il y a aussi de nouvelles têtes.

«C’est très stimulant, note M. Van Vliet. Pour la première fois depuis des années, nous avons dû voter parce qu’il y avait plus de candidats que de postes. Très stimulant donc, mais ça démontre aussi qu’il y a de l’inquiétude. Les gens veulent s’investir parce qu’ils doivent défendre leur peau. Quoi qu’il en soit, ceux qui n’ont pas été élu, nous allons les mettre à contribution d’une manière ou d’une autre. Il y a tellement de défis à relever.»

Premier d’entre eux, la négociation collective, qui demeure sur la planche à dessin depuis de nombreuses années sans que l’on ne voit poindre le début d’un aboutissement possible. Ce fameux contrat minimum en deçà duquel aucun patron de presse ne pourrait aller, libre ensuite à chaque journaliste de négocier de meilleures conditions. Un contrat qui permettrait de mettre fin à trente ans de non augmentation des tarifs au feuillet, ce qui, compte tenu de l’inflation, signifie une baisse de la rémunération nette.

La pige en région

Ce que souhaite l’AJIQ, obtenir un statut pour les journalistes indépendants, puis sur le même principe que ce que les artistes ont obtenu avec l’UDI, pouvoir avoir le droit de négocier collectivement des conditions – rémunération, droits d’auteur, droits moraux, protection syndicale et juridique – minimales.

«Chaque fois qu’il y a un nouveau gouvernement, il faut tout recommencer, souligne Simon Van Vliet, qui avoue que depuis que le gouvernement libéral est aux commandes le dossier n’a pas avancé d’un pouce, les ministères de la culture et du travail se renvoyant la balle. Il y a un peu plus d’un an, on était tout proche d’entrer en commission parlementaire. Là, on en est loin. Bref, ça risque bien de pas mal m’occuper cette année.»

Autre dossier qui devrait l’occuper, la situation de la pige en région. La disparition de plusieurs titres à la suite du rachat par TC Média des hebdos appartenant jusqu’à la fin 2013 à Québécor, faisant de certaines régions de véritables déserts médiatiques, en avait déjà inquiété plus d’un…

«Il y a aussi le Soleil, qui ne prend plus de pigistes dans l’est du Québec depuis quelques mois, fait valoir le nouveau président de l’AJIQ. Il y a aussi l’annonce de l’arrivée d’un nouveau joueur, à savoir Capitales Médias, qui vient de racheter les quotidiens régionaux de Gesca, ce qui nous laisse complètement dans l’expectative. Le nouveau groupe acceptera-t-il de reprendre à son compte le contrat type que nous avions signé avec Gesca lors du recours collectif? On sait par exemple que La Presse en tenait compte mais pas forcément les autres quotidiens du groupe. Que va-t-il advenir?»

Freiner la précarisation

La question des droits d’auteur se pose également quant au partage des textes entre La Presse et les six autres quotidiens, la convention collective stipulant que ce partage était permis entre les titres de Gesca.

«Or, ils ne font plus partie de Gesca, argue Simon Van Vliet. Ça ne concerne pas forcément les pigistes. Mais l’AJIQ souhaite de plus en plus se porter à la défense de tous les journalistes précaires, les surnuméraires par exemple. Nous voulons travailler avec les syndicats de salariés pour freiner la précarisation du métier quel que soit le statut. Tout en cherchant à développer une pratique de journalisme contemporain, en phase avec les mutations qu’on connait, mais sans rogner sur l’éthique et les valeurs journalistiques indispensables à toute démocratie.»

Si le nouveau président est donc très conscient des enjeux et des défis qui l’attendent, il souhaite cependant rester optimiste quant à l’avenir.

«Oui, nous traversons une crise sans précédent, admet-il. Mais c’est l’occasion de nous réinventer. Certains prétendent que je suis un utopiste… sans doute. J’aime une phrase d’un de mes anciens collègues du CA, Nicolas Falcimaigne, qui dit, «il faut être pessimiste dans l’analyse, mais optimiste dans l’action». Il faut miser sur nos forces et voir les opportunités plutôt que d’être terrassés par les menaces et de crouler sous le poids de nos faiblesses. C’est dans cette optique par exemple que nous organisons en juin les Grands Prix du journalisme indépendant (GPJI). C’est l’occasion pour nous de montrer qui nous sommes, ce que nous faisons, en quoi nous sommes essentiels. De faire comprendre au public ce que nous apportons en terme de diversité des perspectives, des voix, des sujets. Le grand public ne sait pas toujours quel est notre rôle dans la société.»»

Célébrer le métier

Après avoir été organisés en grande pompe en septembre 2013 à l’occasion des États généraux du journalisme indépendant, les GPJI reviennent donc cette année dans une formule plus légère. Ils auront lieu le 10 juin prochain au Cabaret du Lion d’Or. Quant aux candidatures, elles sont les bienvenues jusqu’au 17 avril.

«Même si nous allons faire à la mesure de ce que sont nos moyens de journalistes indépendants, c’est important de marquer le coup, de nous rassembler, de fêter ensemble, de célébrer le métier que nous avons choisi de pratiquer, malgré le fait que les conditions sont excessivement difficiles», assume Simon Van Vliet.

Des conditions difficiles, que, on l’aura compris, le nouveau président va mettre toute son énergie à combattre au cour des prochains mois.

(Photo – Twitter)

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