Plus que quelques jours pour le World Press Photo

L’exposition 2015 du World Press Photo, considéré comme les Oscars du photojournalisme, ferme ses portes dimanche au Marché Bonsecours à Montréal. Il ne vous reste donc que quelques jours pour venir admirer les remarquables clichés que vos collègues ont pris l’an dernier tout autour de la planète.

Par Hélène Roulot-Ganzmann @roulotganzmann

Remarquables par la qualité, l’angle, l’instant que ces professionnels de l’image ont su capter. Remarquables aussi parce que tous ces clichés mis bout à bout nous font revivre un an d’événements internationaux. Nous font prendre conscience s’il le fallait encore, que la planète est à feu et à sang.

Il y a les manifestations à Kiev, capitale de l’Ukraine, après le rejet par le président d’alors, Viktor Ianoukovitch, pro-russe, d’un accord d’échange avec l’Union européenne. Manifestations réprimées par balles et qui feront soixante-dix morts. Puis les combats dans l’est de l’Ukraine, la fuite des civil. Et enfin, le crash du vol MH17 de la Malaysia Airlines au dessus de villages à la frontière entre l’Ukraine et la Russie, vol possiblement abattu par un missile, … et ces corps que l’on retrouve dans les champs, encore attachés à leur siège…

Il y a les affrontements près de la place Taksim à Istanbul, en Turquie, entre la police et la population qui se soulève contre l’autoritarisme croissant du Premier ministre Erdogan. Et cette jeune fille, blessée.

Il y a le Nigeria et les robes de classe et autres effets personnels des 276 jeunes filles enlevées dans le dortoir de leur lycée, par les militants islamistes de Boko Haram.

17_Glenna Gordon

Il y a l’offensive estivale d’Israël sur Gaza destinée à détruire le potentiel militaire du Hamas. Ces femmes qui pleurent dans une cage d’escalier pendant des funérailles. Les combats, qui ont duré sept semaines, ont fait plus de 2100 victimes dans les territoires occupés, dont 70% de civils. 67 soldats et six civils sont morts du côté israélien.

Il y a la Sierra Leone où Ébola est revenu sévir. Les fossoyeurs qui se reposent après une dure journée d’enterrement. Et Médecin sans frontière qui tente, en combinaison intégrale, de venir à bout de ce fléau.

13_Pete Muller

Et puis, il y a ces réfugiés entassés sur des embarcations de fortune. Là, ils sont au large des côtes libyennes. Ils risquent la noyade pour rejoindre l’Europe, en l’occurrence, la petite ile italienne de Lampedusa. Et entre sauvetage et surveillance, ces frégates européennes qui patrouillent. On estime que 150 000 personnes ont pu ainsi être sauvées. Un quart d’entre elles étaient syriennes.

14_Massimo Sestini

La Syrie. Car il y a enfin Kobané. Cette ville kurde aux portes de la Turquie. Cette ville prise par les djihadistes de Daech. De la fumée, de la poussière et des flammes qui s’élèvent sur une colline après un raid aérien américain sur cette colline ou les islamistes avaient planté leur drapeau.

Expositions complémentaires

Sous nos yeux, dans cette salle du Marché Bonsecours, une année de drames humains vus par les plus grands photographes de la planète. Ils s’appellent Serguey Ponomarev, Bulent Kilic, Glenna Gordon, Massimo Sestini, Jérôme Sessini ou encore Pete Muller. Ils sont pigistes ou font partie des plus grandes agences de presse et chaque jour, ils mettent leur vie en danger pour rapporter les clichés qui feront la une des grands médias tels que le Wall Street Journal, le New York Times ou le Washington Post, et qui marqueront les consciences.

Toutes ces photos sont encore visibles jusqu’à la fin de la semaine au Marché Bonsecours à Montréal. Toutes celles-là est bien d’autres. Car le World Press Photo, c’est 150 images primées dans huit catégories par 42 photographes de dix-sept pays.

C’est aussi l’occasion de mettre en avant des expositions complémentaires. Comme celle cette fois-ci, qui s’intitule Wapikoni, quand le cinéma crée des ponts. Dix années d’interventions du Wapikoni – le cinéma des Premières nations – dans les communautés autochtones d’ici et d’ailleurs, captées par l’appareil photo des formateurs, intervenants et participants.

Ou quand les communautés autochtones décident de projeter leur propre image, de se montrer telles qu’elles sont, telles qu’elles se voient.

«Pour que les gens puissent nous voir tels que nous sommes, raconte le rappeur Samian, porte-parole de cette édition 2015 du World Press Photo, lui-même adepte de la photo même si en toute humilité il avoue avoir trop d’estime pour les photojournalistes pour se prétendre l’être lui-même. J’ai fait beaucoup de photos à l’occasion de mes voyages à l’étranger. Mais lorsqu’on m’a proposé d’exposer ici, j’ai décidé de prendre la route, au Québec. De pénétrer à l’intérieur des communautés, dans le monde autochtone qui est le mien. Afin de faire découvrir ce type de visages qu’on connait moins.»

Car c’est sans doute aussi ça, le World Press Photo. C’est cette volonté de changer le monde en le montrant tel qu’il est. Dans ce qu’il a de plus violent. Dans ce qu’il a de moins visible également.

10ème édition du World Press Photo à Montréal. Dans la salle de la commune du Marché Bonsecours dans le Vieux-Montréal, jusqu’au 27 septembre à 22h. Renseignements ici.

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Crédits photos : 1. Glenna Gordon – 2. Pete Muller – 3. Massimo Sestini

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