Soutien à la presse: le gouvernement étudie la question

Le ministre de la culture Luc Fortin rencontrera les médias régionaux au cours de l’automne pour entendre leurs préoccupations et leurs propositions.

Par Hélène Roulot-Ganzmann @roulotganzmann

newspapers-444447_1280«Le ministre est très préoccupé par la situation de la presse en région, affirme son attaché de presse Karl Filion en entrevue à ProjetJ. Une analyse de la situation est en train d’être menée et M. Fortin rencontrera les médias durant l’automne. Rien n’est encore décidé. Est-ce qu’il est possible d’attribuer des crédits d’impôts? De soutenir par d’autres moyens? Tout est sur la table, avec aussi en ligne de mire, la nécessité de préserver l’indépendance éditoriale de la presse.»

Un changement de discours donc au ministère alors même qu’il y a à peine six mois, la prédécesseur de M. Fortin, Hélène David, refusait de s’engager sur la question. Le 22 avril dernier, Le Devoir rapportait en effet que, pressée par la députée péquiste Véronique Hivon de préciser si le gouvernement Couillard pourrait envisager une aide financière additionnelle aux journaux et autres médias menacés de fermeture en raison des bouleversements qui ébranlent leur industrie, Mme David avait répondu que les journaux régionaux se débrouillaient bien seuls.

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En marge des consultations publiques sur le renouvellement de la politique culturelle québécoise cet été, le ministre Fortin, s’est donc pour sa part dit «extrêmement réceptif» à l’idée de venir en aide aux médias régionaux «afin d’assurer leur pérennité», rapporte le journal La Tribune, qui ajoute que selon lui, la diversité de l’information est un enjeu «fondamental pour la démocratie» et qu’il compte «poser des gestes structurants» qui bénéficieront aux médias régionaux, incluant les journaux.

3$ par habitant

En entrevue, Karl Fillion est revenu sur la demande du nouveau directeur du Devoir, Brian Myles, d’en arriver à un soutien ciblé de l’État, n’excédant pas cinq ans, pour aider les médias imprimés à développer de nouvelles stratégies d’affaires et de nouvelles plateformes numériques.

«Nous avons entendu cette demande, indique-t-il. Mais est-ce la bonne solution? Est-ce que cinq ans, c’est suffisant? Est-ce que la crise sera dernière nous? Est-ce que les entreprises auront réellement eu le temps de prendre leur virage numérique? Nous devons entendre les autres médias, notamment en région, pour savoir si leurs préoccupations et leurs demandes rejoignent celles de M. Myles.»

Dans son éditorial du 27 aout dernier, Brian Myles est longuement revenu sur la situation du Devoir en particulier et des journaux nationaux et régionaux en général. Depuis quelques mois, les directions de plusieurs médias écrits – Groupe Capitales Médias, TC Média, Hebdo Québec – en ont appelé à l’État, pour les soutenir dans la révolution numérique qu’ils sont en train d’entreprendre. M. Myles rappelle également qu’avec un montant de 3$ par habitant, le Québec et le Canada sont des nations qui aident le moins leurs médias écrits, loin derrière les pays scandinaves, mais aussi les États-Unis.

Éviter de nuire

Il demande également, à défaut de se voir octroyer des crédits d’impôts ou toute autre aide financière, que l’État évite de nuire à la presse écrite. En finir avec la taxe recyclage serait une première grande avancée dans cette direction, selon lui.

«Par ailleurs, Le Devoir ne peut concevoir la nouvelle tendance en matière de placement publicitaire du gouvernement du Québec, écrit son directeur. En investissant davantage en programmatique, l’État rejoint des masses d’utilisateurs des médias sociaux, à faible coût, mais il contribue de ce fait à enrichir les conglomérats transfrontaliers qui ne créent pas de richesse ni d’emploi au Québec.»

Une préoccupation qui rejoint cette fois une demande de Mme David. Celle-ci a en effet affirmé avoir rappelé à ses collègues l’importance, pour leur ministère, d’acheter de la publicité dans les journaux régionaux, une source de revenus majeure pour ces publications.

Depuis 1995, un décret «incite» les ministères à investir 4% de leur budget publicitaire dans les médias communautaires. Mais cette cible est rarement atteinte, note Le Devoir.

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