Des bourses pour aider les pigistes en zone à risques

D’après Reporters sans frontières, 135 reporters et journalistes citoyens sont morts l’an denier dans l’exercice de leurs fonctions. Un nombre record, et parmi eux, une proportion grandissante de pigistes. Pour remédier à cela, le Forum du journalisme canadien sur la violence et le traumatisme attribue cette année encore des bourses de formation pour les aider à travailler en zone à risques. Journalistes pigistes, vous avez jusqu’à la fin du mois d’août pour déposer votre candidature.

Par Hélène Roulot-Ganzmann (Première publication en juillet 2013)

Les pigistes sont particulièrement vulnérables sur le terrain. Moins bien préparés, ils ne bénéficient pas du soutien d’un grand groupe de presse en cas de problème.

Jean-Pierre Bastien est spécialiste de l’Amérique du Sud. S’il travaille cet été comme employé à Radio-Canada à Montréal, il est d’ordinaire pigiste et a été lauréat de la bourse l’an dernier alors qu’il se trouvait en Colombie. Il avait beau là-bas collaborer à de grands groupes tels que La Presse ou déjà à l’époque Radio-Canada, il ne pense pas avoir eu quelque soutien de leur part en cas difficulté sur le terrain.

«Je n’étais pas à proprement parlé dans un pays en guerre, raconte-t-il, mais dans mon travail de reporter, il m’arrivait de visiter des zones de tensions fortes, des zones que se disputent le gouvernement et la guérilla. Avant la Colombie, j’ai travaillé au Brésil, en Équateur et en Bolivie. Je ne peux dire que je me sois senti véritablement en danger dans l’exercice de mes fonctions. Mais il y a des situations plus inconfortables, où l’on sent de la tension, de la méfiance. La formation que j’ai suivi grâce à cette bourse m’a aidé à mieux préparer mes voyages afin d’éviter certaines situations embarrassantes.»

Formation à Columbia

Ainsi, les lauréats reçoivent une somme leur permettant de suivre une formation adéquates pour les journalistes œuvrant en zone de conflits.

Jean-Pierre Bastien a passé trois jours à l’Université Columbia à New-York. Au programme: le maniement des armes et le comportement à adopter en cas de présence de gens armés, la sécurité informatique, des conseils psychologiques ou comment traverser une situation chargée en émotion, une formation aux premiers soins, les gestes qui sauvent, comment arrêter un saignement, transporter un collègue blessé, et les techniques d’autodéfense.

«Cette formation permet surtout de rencontrer d’autres journalistes venus de toute la planète et de partager nos expériences ensemble, mais aussi avec les formateurs qui sont eux aussi souvent allés en terrain miné. C’est sûr qu’en trois jours, on ne peut pas faire le tour de la question. Mais j’ai appris à mieux planifier mes reportages. Je prends ainsi moins de risques et ça m’aide à vivre plus tranquillement quand la tension s’installe.»

Actions de lobbying

Le Forum du journalisme canadien sur la violence et le traumatisme attribue des bourses de 1000 $ pour suivre ces trois jours de cours à New-York, et d’autres, pouvant atteindre 2 500 $, pour une formation plus longue dans l’une des cinq institutions agrées, toutes situées au Royaume-Uni et aux États-Unis.

Le Forum est parrainé par CBC News et bénéficie du soutien de Radio-Canada, de Canada Newswire, de Macintosh Media et de dons de particuliers. L’année dernière, il a attribué quatre bourses à quatre pigistes, qui, en plus de la formation, ont reçu une somme additionnelle de la part du Rory Peck Trust. Cette association basée en Angleterre vient elle aussi en aide aux pigistes et mène des opérations de lobbying pour amener les médias qui les font travailler à leur octroyer un plus grand soutien.

«Cette situation est inquiétante et devrait préoccuper tous les organes de presse, estime Cliff Lonsdale, président du Forum du journalisme canadien. Si les organisations ne sont pas en mesure de soutenir tous les pigistes qu’elles emploient, au moins pourraient-elles apporter leur contribution à ce genre de fonds indépendants pour aider les cas les plus pressants», suggère-t-il.

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