Hacks/Hackers revient à Montréal

Un petit groupe de passionnés de journalisme de données a décidé de faire revivre le groupe montréalais Hacks/Hackers, mouvement international qui depuis 2011, organise des rencontres entre journalistes, programmeurs et développeurs, afin de dédramatiser le code. Le premier événement aura lieu mercredi. Et aura pour thème les élections fédérales.

Par Hélène Roulot-Ganzmann @roulotganzmann

Jean-Hugues Roy est aujourd’hui professeur à l’École des médias de l’Uqàm après avoir fait carrière à Radio-Canada. Nael Shiab est le journaliste de données attitré de l’édition montréalaise du journal Métro. Florent Daudens, journaliste web, radio et télé, spécialisé en nouveaux formats à Radio-Canada. Quant à Roberto Rocha, il est webjournaliste pour CBC-Montréal. Leur point commun? Leur passion pour le code. Et la certitude qu’ils ont que l’avenir, ou que du moins, un certain avenir du journalisme, passe par lui.

10551503_10153200234195600_6715624680751221706_o«Le code a changé ma vie, n’hésite pas à affirmer Nael Shiab. Grâce à lui, je m’éclate tous les jours dans mon métier. Aujourd’hui, savoir coder, c’est se distinguer tout en étant de son temps. Le code est partout. Savoir le maitriser, c’est avoir une latitude incroyable, pouvoir sortir des sujets d’intérêt public, aller dans un niveau de détails incroyable. C’est aussi impliquer le lecteur. En journalisme traditionnel, on cherche à avoir un personnage fort. En journalisme de données, le lecteur devient actif. Il est le personnage central. C’est en tout cas ce que moi, j’essaye de faire.»

Ce qu’il a fait notamment avec son comparatif des prix des vins au Québec et en Ontario, qui permettait pour plus de 1000 références de bouteilles de savoir s’il était intéressant ou non de passer la frontière ontarienne pour faire ses réserves. La semaine dernière, il proposait également aux Québécois de mieux comprendre la réalité vécue par les Syriens. Ainsi, les principales données du conflit – nombre de personnes tuées ou blessées, enfants qui vivent dans l’extrême pauvreté, réfugiés, impact sur l’économie, etc. – étaient ramenées à l’échelle de chaque localité du Québec.

«Ça parle plus, estime-t-il. C’est plus palpable que des chiffres bruts qui ne veulent rien dire dans l’esprit des gens. Ça permet d’aller plus loin que la nouvelle.»

Devenir des journalistes de données autonomes

Leur passion, les quatre journalistes souhaitent la partager avec le plus grand nombre d’artisans de l’information. Parce qu’il en va selon eux de la survie même du métier, alors que la profession est attaquée de toute part par la profusion de nouvelles délivrées gratuitement sur une multitude de plateformes. Le journalisme de données, lui, a de la valeur.

«Mais c’est encore un monde inexploré au Québec, indique M. Shiab. Parce que les médias ont de moins en moins de moyens et de temps et qu’il y a très peu de journalistes formés à ces techniques. C’est ce que nous proposons de faire avec le groupe Hacks/Hackers. De former les journalistes. De les mettre en contact avec des programmeurs. Pour qu’ils prennent conscience de tout ce qu’ils peuvent faire. Et pour qu’ils développent des techniques afin de devenir autonomes. Car souvent, les journalistes aiment faire les choses par eux-mêmes. Et puis crise dans l’industrie oblige, il y a bien des médias qui sont incapables de se payer une équipe de datajournalistes composée à la fois de reporters et de développeurs.»

«Hacker les élections comme un journaliste»

Les rencontres devraient avoir lieu une fois par mois et seront organisées autour de conférences et de projets à développer. La première, qui se tiendra mercredi soir, a pour titre «hacker les élections comme un journaliste.» À cinq jours de l’événement, plus de soixante-dix personnes s’y sont inscrites.

«Le but, c’est vraiment que les gens sortent de là avec une meilleure expertise, explique Nael Shiab. Tous ceux qui le souhaitent pourront travailler sur le projet pratique.»

L’idée part du fait que, sur le site d’Élections Canada, tous les dons aux partis politiques sont listés, et qu’il est donc possible de savoir qui donne combien à quel parti.

«Mais c’est fastidieux, témoigne M. Shiab. Il faut y aller page par page. Personne ne fait ça! Or, c’est de l’information d’intérêt public.»

Les participants mettrons donc sur pied un programme informatique capable de récupérer toutes ces données et de les classer afin de pouvoir y avoir accès facilement et de les analyser.

«Je suis certain que ça va intéresser pas mal de monde, conclut le coorganisateur. Encore un exemple de projet de journalisme de données qui permet d’aller au-delà de la nouvelle. En l’occurrence, au delà du discours officiel des chefs.»

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Hacks/Hackers Montréal, le 16 septembre 2015 à partir de 18 heures à la maison Notman. Tous les renseignements ici.

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