Smartcut Agency: repenser l’information internationale

Smartcut Agency propose aux médias tout un éventail de services allant de l’obtention de permis de tournage à la réalisation de reportages clé en main à l’étranger, par des journalistes déjà sur place, chevronnés et connaissant bien le terrain. Une réponse à la crise financière que traversent les rédactions, selon son fondateur David Noreau. Tout en tirant partie de l’esprit collaboratif du numérique.

Par Hélène Roulot-Ganzmann @roulotganzmann

AAEAAQAAAAAAAASvAAAAJGJlZDc1ZmVmLTc5N2EtNDcwNS04YmU5LTA0NTFiZWNlNzg4NA«Je nous vois comme une sorte de satellite, explique David Noreau. Nous ne sommes pas une rédaction, nous ne sommes pas un média, nous sommes à côté, à l’affut de leurs besoins, susceptibles aussi d’être de bon conseil.»

«Nous», c’est donc David Noreau, le président fondateur de cette agence d’un nouveau genre au Québec, au Canada et même en Amérique du Nord, à le croire. C’est aussi quatre autres personnes qui gravitent autour de lui dans les bureaux de l’avenue Mont-Royal à Montréal. C’est encore six cents collaborateurs dans une cinquantaine de pays à travers le monde, tous artisans de l’information et susceptible de réaliser des enquêtes, des reportages, des entrevues, de mener des pré-entrevues, de trouver des témoins, d’assister un journaliste, ou encore de s’occuper de toute la logistique sur place.

«Mais c’est aussi quelques contacts avec lesquels j’ai des relations privilégiées, précise M. Noreau. Ce sont mes complices, mes alliés. Des gens que j’ai rencontrés lorsque je faisais mes études à Londres, ou par la suite, lors de mes différentes missions à l’étranger, en Inde et au Sénégal par exemple. Des gens très implantés sur leur terrain. J’ai notamment un contact à Gaza, qui m’a dit que si une équipe voulait entrer dans les tunnels palestiniens, il pourrait m’arranger ça.»

David Noreau est passé par la maitrise en journalisme international de l’Université Laval, qui l’a mené également à étudier à la City University de Londres en Angleterre. Il multiplie ensuite les contrats, pour Radio-Canada, la Canal-Savoir, l’AFP, pour des maisons de production également, en tant que journaliste, réalisateur, photographe, recherchiste. À la fois à Montréal et à l’étranger.

«Un jour, j’ai fait le point, explique-t-il. Je me suis rendu compte que notre métier évoluait beaucoup, qu’il n’y avait plus beaucoup d’argent dans les rédactions. Je n’étais d’ailleurs pas certain de vouloir faire partie intégrante d’une salle de nouvelles. Mais il me paraissait aussi assez difficile de vivre de la pige. J’ai entendu parler du journalisme entrepreneurial. Mais je pensais que ce n’était pas pour moi. Je n’avais vraiment rien d’un entrepreneur. Ça ne me tentait pas. Et puis, un soir, j’ai discuté avec une journaliste qui revenait d’Inde. Son tournage s’était mal passé, notamment parce que les techniciens qu’elle avait emmené avec elle avaient refusé de s’adapter à la vie locale. Ça a allumé une petite lumière en moi.»

Pour en finir avec les clichés

Son idée donc, mettre en relation des gens sur place avec des journalistes occidentaux. Des fixeurs bien sûr, mais aussi des cameramen, des preneurs de son, des recherchistes, etc. Plusieurs avantages à cela selon lui : sauver de l’argent puisque la salle de nouvelles envoie une seule personne au lieu de toute une équipe, réduire l’empreinte carbone puisque moins de gens voyagent, mais aussi, travailler avec des gens qui connaissent bien le terrain, susceptibles d’expliquer un contexte, de trouver les bons interlocuteurs, de débloquer des situations, d’éviter les clichés aussi.

«Avec la crise, il y a moins de correspondants sur place, les journalistes vont et viennent, il est difficile pour eux de s’imprégner d’un contexte, estime de fondateur de Smartcut Agency. Le risque est grand qu’ils posent un regard d’occidental sur une situation. En travaillant avec des gens sur place, ils gardent la distance nécessaire et ils restent garants de ce qui intéresse leur public, mais ils sont confrontés aux idées préconçues qu’ils peuvent avoir.»

En plus de monter des équipes techniques sur place pour les besoins d’une salle de nouvelles d’ici, Smartcut Agency peut organiser des entrevues via Skype avec des témoins à l’étranger par exemple. L’agence supervise également des reportages clé en main ou fait juste en sorte d’obtenir des autorisations de tournage. Parfois, il s’agit de gérer toute la logistique, les déplacements, le logement pour toute une équipe. Tout cela pourrait même avoir lieu en zone de conflit et alors là, le paramètre sécurité entrerait en jeu.

«Nous n’avons pas encore eu un tel projet, indique David Noreau, mais nous serions prêts à l’assumer. Nous ferions intervenir ceux que je nomme mes complices. Eux savent quoi faire, quel est le niveau de risque. Certains fixeurs ont reçu une formation de sécurité en zone de conflit. Nous pouvons mettre des gardiens de sécurité au service des équipes si besoin. Nos communications pourraient être encryptées. J’ai réalisé mon rapport de maitrise sur les risques du travail journalistique dans une guerre civile versus une guerre conventionnelle, j’y suis donc sensibilisé. Il ne s’agit pas pour moi de faire travailler des pigistes là où les salles de nouvelles ne veulent pas envoyer leurs journalistes parce que c’est trop risqué, et de m’en laver les mains. J’ai une responsabilité et je la mesure.»

Et de conclure que son business ne pourrait être autrement que «gagnant-gagnant-gagnant». Gagnant pour les médias d’ici, gagnant pour les équipes locales, gagnant pour Smartcut Agency.

On pourrait peut-être ajouter un quatrième, voir un cinquième gagnant : l’information internationale d’une part. Et le public de l’autre.

Cet article vous a intéressé? Faites-un don à ProjetJ.

Pour plus d’infos, visitez le site de Smartcut Agency

(Photo: LinkedIn)

À voir aussi:

«Contextualisée, la nouvelle devient souvent plus plate»

Pas de démocratie sans éducation aux médias

Les Autochtones, ces oubliés des médias

Les élections, un terrain de jeu exceptionnel pour les étudiants

«Foglia nous dévoile tels que nous préférerions ne pas nous voir»

Bernard Descôteaux: «mon successeur devra agir vite»

You may also like...