Baisse des effectifs dans les programmes en journalisme

Alors que les salles de nouvelles accueillent de moins en moins de journalistes et que le public se défie de plus en plus des médias, il semble bel et bien que les programmes en journalisme dans les principales universités d’ici, vivent eux-aussi une période de désaffection.

Par Hélène Roulot-Ganzmann @roulotganzmann

 «Les effectifs ont baissé passablement dans toutes les programmes en journalisme à travers le monde, explique Robert Maltais, responsable du Certificat en journalisme dispensé à la Faculté d’éducation permanente de l’Université de Montréal. Ça va de Columbia à New York jusqu’à l’Université de Montréal.»

Oui, mais à quel point? Au point d’imaginer que ces programmes puissent un jour mettre la clé sous la porte?

«Les effectifs ont considérablement baissé depuis dix ans, répond M. Maltais, mais le programme en lui-même est toujours plein de vigueur. On a perdu 50% de nos étudiants. Mais nous les avons retrouvés au DESS que nous avons créé il y a quelques années. Sauf que ce n’est pas la même clientèle. Au DESS, celle-ci vient majoritairement d’Europe. Alors que la clientèle du Certificat est plus nord-américaine, voire québécoise.»

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Ce programme accueille aujourd’hui une soixantaine étudiants par année et compte environ deux cents dossiers actifs.

Des baisses partout

Qu’en est-il ailleurs? À l’Université du Québec à Montréal (UQÀM), le cours est contingenté.

«Il y a donc plus de demandes que de places et nos effectifs, jusqu’à l’année dernière, n’ont pas énormément varié, explique Jean-Claude Burger, directeur du programme. Cela dit, l’an dernier, nous avons connu une baisse importante mais je ne crois pas qu’on puisse en tirer de grandes conclusions. L’UQÀM a été en grève ces dernières sessions et c’est sûr que les futurs étudiants réfléchissent à deux fois avant d’intégrer une université qui a tendance à suspendre les cours.»

Chaque année, sur les trois ans du baccalauréat, l’École des médias de l’UQÀM totalise 150 à 180 étudiants.

«Et ça, pour l’instant, ça ne change pas, insiste M. Burger. Si on fait abstraction des hauts et des bas, qui peuvent être conjoncturels, je dirais que le programme, pour l’instant, n’a pas perdu d’étudiants. Quant aux demandes, on en a 348 pour la cession de l’automne prochain. Et ça se joue toujours généralement entre 350 et 400.»

Au tournant des années 2000, jusqu’à 1000 dossiers pouvaient cependant être déposés en vue d’intégrer le baccalauréat en journalisme.

À l’Université Laval, les admissions combinées aux trois programmes de premier et de deuxième cycles du Département d’information et de communication ont chuté de plus de la moitié sur une décennie, pour passer de quelque 110 à environ 45 étudiants, rapporte Stéphane Baillargeon dans un article paru samedi dans le journal Le Devoir.

Refonte des programmes

«Il y a un déclin sans doute lié aux perspectives d’emploi, commente Colette Brin, professeur au département d’Information et de communication et directrice du Centre d’études sur les médias. Il y a aussi un effet de cercle vicieux comme dans bien d’autres programmes, particulièrement en sciences humaines: moins d’étudiants, donc moins de ressources, moins de capacité de recrutement… Mais il n’est pas question de faire disparaître ces programmes. On s’adapte plutôt au contexte, on revoit l’offre de cours comme on peut, en espérant que les choses se stabiliseront.»

Il semble donc bien qu’il y ait une certaine désaffection dans les principaux programmes universitaires en journalisme ces dernières années. Du fait du manque de perspectives d’emplois certes, mais aussi sans doute des cours eux-mêmes, qui mettent parfois trop de temps à s’adapter à la nouvelle réalité que vivent les professionnels sur le terrain.

L’Université d’Ottawa lance cette année son nouveau programme en journalisme numérique. Laval développe un microprogramme de journalisme scientifique qui devrait être offert d’ici un an. L’UQÀM a tout revu de fond en comble il y a deux ans en insistant notamment sur le journalisme de données. Quant au Certificat à l’UdeM, il lancera lui aussi un nouveau  programme, «probablement» à la rentrée de janvier.

«C’est un gros navire l’Université, conclut Robert Maltais. Tout tourne lentement.»

Peut-être un peu trop lentement alors que le monde du travail lui, a plutôt tendance à s’accélérer.

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