Le World Press Photo s’arrête à Montréal

Comme chaque rentrée, les photoreporters du monde entier sont à l’honneur à Montréal avec l’ouverture de l’exposition du World Press Photo au Marché Bonsecours. Une belle façon de revenir en images sur les sujets forts que les journalistes ont choisi de mettre en une durant les derniers mois.

Par Hélène Roulot-Ganzmann @roulotganzmann

Et force est de constater que le sort des enfants du  monde entier a particulièrement marqué ceux qui chaque jour doivent dénicher les images destinées à illustrer l’actualité. Les enfants fuyant la guerre en Syrie, ceux qui tentent de survivre aux bombes au Darfour, alors que ce territoire est-africain est fermé aux ONG, ou encore ceux qui, victimes du terrible tremblement de terre d’avril 2015 au Népal, attendent les secours dans les ruines de leurs maisons ou dans les villages reculés de l’Himalaya.

Parmi ces clichés, la photo de l’année de l’Australien Warren Richardson, qui relate le destin d’un bébé tendu entre les mailles d’une clôture en fil barbelé.

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Migrants crossing the border from Serbia into Hungary.«Comme l’a si bien dit Francis Kohn, président du jury [et directeur photo de l’AFP monde, ndlr], cette image parle «d’angoisse, de précarité, et d’espoir», raconte le producteur du World Press Photo Montréal, Matthieu Rytz. Angoisse d’un passé terrifiant, précarité d’un présent incertain, espoir d’un futur meilleur. La fragilité de ce moment est fulgurante pour ce jeune humain à la croisée des chemins. Une autre image aurait pu être récompensée, ajoute-t-il. Rappelons-nous, il y a une année, cette photo d’un enfant mort sur une plage de Turquie, face contre terre. Un bébé dont la vie a été brisée. Un enfant qui aurait pu avoir un tout autre sort, dans une nouvelle terre d’accueil, par exemple à quelques rues d’ici, à Montréal.»

Comme Alaa et ses enfants, Hamzah et Ilona. Comme George et son grand-père Chabo. Comme Reem et ses deux garçons. Tous réfugiés syriens à Montréal, tous parrainés par une famille d’accueil. Tous immortalisés par les clichés du photographe Guillaume Simoneau dans une exposition signée Anaïs Barbeau-Lavalette et intitulée Je ne viens pas de l’espace.

50 000 visiteurs attendus

«Les nouveaux arrivants syriens sont des milliers à avoir rejoint le Québec au cours des derniers mois, explique-t-elle. Encore à vif, certains toujours craintifs de représailles, la plupart ont préféré ne pas être photographiés. Quatre familles syriennes, fraîchement arrivées, ont accepté de nous rencontrer, en compagnie de leurs premiers alliés au pays: des familles de Montréalais qui les parrainent et les accueillent dans un quotidien tout neuf. Nous avons voulu raconter l’après. Après la peur, après les bombes, après la route. Nous avons voulu raconter leurs premiers pas dans une lumière nouvelle», explique Anaïs Barbeau-Lavalette.

En plus des 150 photos primées, l’édition montréalaise du Word Press Photo présente ainsi quatre expositions, en lien avec l’actualité. L’équipe d’Oxfam-Québec, partenaire traditionnel de l’événement, aborde la problématique et les répercussions des paradis fiscaux dans l’écosystème économique mondial, en lien avec sa campagne À la recherche des milliards perdus. Il y a aussi quelques photos prises par les correspondants de Radio-Canada en Irak, en Syrie ou encore à Fort McMurray pendant les incendies de ce printemps.

Les visiteurs sont ainsi invités à découvrir le travail de ces correspondants à l’étranger, à travers leur propre regard, peut-on lire. L’univers de ces équipes ainsi que leur volonté d’informer le public sont mis de l’avant tout au long du parcours. De la campagne électorale américaine au désert irakien, les visiteurs pourront voir d’un nouvel œil certains événements ayant marqué l’actualité internationale. Les journalistes partagent leurs impressions et racontent le contexte particulier ayant mené à leurs reportages.

img_4834Le Word Press Photo est présentée jusqu’au 2 octobre dans la salle de la Commune du Marché Bonsecours. Plus de 50 000 visiteurs sont attendus.

«L’édition montréalaise est l’une des plus populaires parmi la centaine présentée partout dans le monde, souligne Matthieu Rytz, producteur de l’événement. Cette relation privilégiée avec nos visiteurs témoigne de la curiosité, de l’ouverture et de l’engagement des Montréalais à l’égard de l’évolution de nos sociétés. Elle démontre également la pertinence de présenter une fenêtre sur le monde en privilégiant des contenus de qualité.»

(Photo Warren Richardson – l’Espoir d’une vie nouvelle)

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