FPJQ-Estrie: un forum qui redonne espoir

Une cinquantaine de personnes issues des milieux politique, économique, communautaire, sportif et médiatique estriens se sont réunis samedi au restaurant OMG Burger de Sherbrooke, à l’invitation de la FPJQ-Estrie. Le but? Réfléchir à l’avenir du journalisme en région. Entrevue avec Marie-Ève Lacas, journaliste à Radio-Canada Estrie, présidente de la section FPJQ, et à ce titre, organisatrice de ce forum de réflexion.

Propos recueillis par Hélène Roulot-Ganzmann @roulotganzmann

s0NR8OCu_400x400ProjetJ: Quelques jours après l’événement, qu’en retenez-vous?

Marie-Ève Lacas: D’abord, la confirmation que les médias régionaux doivent continuer d’exister et être très présents dans le milieu. Et la satisfaction de voir que les journalistes ne sont pas les seuls à le penser. Les échanges ont été variés et pertinents tout autant de la part de gens qui ne sont pas de la profession que de nos confrères. À l’ère d’internet, alors que tout un chacun peut s’improviser journaliste ou reporter de nouvelles, on est venu nous dire que notre rôle demeurait primordial. Nous sommes sortis de là galvanisés et avec une forte envie de réaffirmer notre métier.

Autour de quels thèmes les discussions ont-elles tourné?

La gratuité est revenue très souvent dans les débats. Malgré internet, les gens nous ont dit vouloir encore lire un journal écrit, encore allumer la télévision pour voir un bulletin de nouvelles. Tout cela pose la question du financement de l’information. Le rôle des annonceurs a été au centre des discussions. Ils sont essentiels pour garder les médias à flot. Un appel au dialogue leur est lancé. Ils ont cru un moment que via internet, ils pourraient rejoindre toute leur clientèle. Ils se rendent compte aujourd’hui que ce n’est pas vrai. Il faut que nous nous rasseyons ensemble à la table car ils sont définitivement une des clés essentielles pour traverser la crise et en sortir plus fort. Suite à ce forum, nous allons les interpeler.

Presque tous les groupes de presse présents en Estrie avaient envoyé un émissaire… quel était leur discours?

Ils ont réaffirmé que la presse régionale traverse une véritable tempête. Que ce sont les annonceurs qui paient les salaires et que le contexte rend leur situation très difficile. Cela dit, on a entendu des choses très positives. Notamment le fait que les différents médias ici, sont plus complémentaires que réellement en compétition. Il faut que tout le monde se serre les coudes. On va faire des reportages à la télévision parce que les images parlent d’elles-mêmes. Les entrevues dans l’instantanéité passent mieux à la radio. La presse écrite, elle, a le loisir de réaliser des papiers plus fouillés. Quant au web, c’est un outil de plus qui ne fera pas disparaitre tout le reste. Les patrons de presse ont compris que les gens tenaient à leurs médias régionaux.

Mais pourquoi y tiennent-ils tant?

Juste un exemple: Maurice Bernier était présent à ce forum. M. Bernier, c’est une figure en Estrie. Il a été préfet de MRC, député bloquiste, et il est originaire de Lac-Mégantic. Il est justement revenu sur cette tragédie pour dire que oui, par certains aspects, elle avait été surexposée. Mais que si la presse régionale n’était pas là, s’il n’y avait pas l’Écho de Frontenac là-bas, deux ans après le drame, qui en parlerait encore? Si on veut savoir ce qui se passe en Estrie, ce n’est pas en lisant la Presse ou le Journal de Montréal qu’on va le savoir. Que ce soit papier, radio, internet, télé, les gens ont besoin de la presse régionale pour être informés de ce qui se passe au bout de leur rue, et de journalistes régionaux qui servent de chiens de garde à la démocratie locale. Et nous ne sommes pas les seuls, nous, gens de médias, à le penser. Nous avons réussi à passionner le public. Ils ont vu notre réalité aussi. Ça a permis de démystifier notre rôle.

Maintenant que vous savez tout ça, comment allez vous transformer l’essai?

Déjà, en invitant les annonceurs à s’asseoir avec nous pour réfléchir. Et puis, notre initiative intéresse grandement la FPJQ au niveau national. Ce forum devrait se répéter dans d’autres régions, notamment en Montérégie l’an prochain. On a semé quelque-chose. Mais on est bien conscients que ce n’est qu’une première étape et qu’il y en aura plusieurs autres avant de pouvoir dire que les médias régionaux sont sortis de la tempête. Et surtout, sortis grandis.

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