Les Québécois passent au numérique. Oui, mais…

Si de plus en plus de Québécois adoptent – avec enthousiasme – les plateformes numériques d’information, ils y voient quand même quelques inconvénients. C’est ce que révèle la dernière étude publiée par le Centre d’études sur les médias de l’Université Laval.

Par Hélène Roulot-Ganzmann @roulotganzmann

Certes, avoir toutes les nouvelles sur sa tablette, son ordinateur et son téléphone intelligent permet de les recevoir de manière instantanée. Une alerte d’abord lorsque l’événement survient, puis les premiers développements et enfin, un gros dossier sur le sujet. Certaines personnes s’interrogent cependant sur la course au scoop que cela engendre et sur ses conséquence sur la qualité de l’information, laquelle peut être incomplète ou erronée parce que non vérifiée. D’autres croient en revanche que le travail du journaliste est sensiblement le même, que les standards de qualité sont demeurés les mêmes, et que c’est la façon de publiciser ou de «marketer» qui a changé.

À part quelques répondants, les plus âgée en général, qui affirment avoir dû passer au numérique contraints et forcés lorsque La Presse a abandonné son édition papier en semaine, la plupart trouve ce passage plutôt enthousiasmant et ne referait le chemin inverse pour rien au monde.

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« En expliquant les raisons qui les incitent à utiliser les médias numériques pour s’informer, les participants font constamment la comparaison avec les médias traditionnels, peut-on lire dans les pages du rapport intitulé Les transformations dans les manières de s’informer au Québec (2011-2016). À leur avis, l’information numérique présente de nombreux avantages en ce qui a trait à la richesse des contenus, à la mobilité, à l’aisance du maniement des appareils, au cout et au gain de temps.»

Plus besoin d’aller chez le dépanneur, ni même d’ouvrir sa porte pour découvrir les nouvelles du jour. À peine levé, les nouvelles sont déjà là, prêtes à être consommées.

Il y a ceux qui apprécient pouvoir avoir toutes les informations sous la main dans un tout petit espace sans avoir à garder des journaux et des magazines qui encombrent leur maison. Ceux qui insistent sur le fait de pouvoir facilement croiser les sources, qu’il s’agisse des médias traditionnels, qui demeurent la principale source d’information pour nombre de Québécois, des commentaires, qui permettent d’affiner les choses parfois et de trouver d’autres informations ayant un rapport, et même, via les réseaux sociaux, de points de vue du quidam moyen.

«Je vais rarement sur les sites de nouvelles, explique l’un d’eux. C’est souvent en parlant au monde ou en passant à côté d’une radio que j’apprends les nouvelles et qu’après j’ai besoin d’en savoir plus. Là, je vais taper directement sur Google. Admettons que je veux savoir ce qui se passe en Syrie, comment ça a débuté, qu’elle est la situation dans tel endroit, je vais taper des mots-clés sur Google et ça va me donner des articles sur exactement ce que je cherche. Je n’ai pas besoin de faire le tour des journaux, je vais directement au but.»

Pas que des avantages

Une richesse et une diversité appréciées notamment par les adeptes de l’information internationale, tant les médias québécois en sont dépourvus. Certains répondants expliquent aller sur les journaux étrangers pour savoir ce qui se passe dans le monde. Ils évoquent Al Jazeera ou encore Paris-Match et trouvent intéressant également de savoir sous quel angle les sujets internationaux sont abordés ailleurs dans le monde.

Mais cette abondance de nouvelles que permet le numérique ne présente pas que des avantages, estiment par ailleurs plus d’un répondant. Certains parlent de dépendance. Ils évoquent le fait que s’informer soit leur premier et leurs dernier geste de la journée et que leur tablette soit toujours sur leur table de chevet. Cette activité peut alors apparaitre comme chronophage et venir gruger sur leur temps de lecture autre notamment.

D’autres évoquent les dangers que les appareils électroniques font peser sur la santé, notamment sur les yeux. D’autres encore leur manque d’habiletés en la matière, habiletés tant techniques – pour les plus âgés en général – qu’éducationnelles. Comment, face à cette abondance, savoir ce qui est une information crédible et ce qu’il ne l’est pas? À cela, ils sont nombreux à répondre consulter principalement les sites et applications des médias traditionnels. Mais d’autres rétorquent que ces derniers ne couvrent pas forcément tous les sujets qui les intéressent particulièrement.

Enfin, les raisons écologiques et financières ont été abordées concernant la décision de passer au numérique. Mais sur ces deux critères, les avis sont partagés.

À ceux qui évoquent les économies de papier, d’autres rétorquent que les appareils électroniques sont éminemment énergivores et que leur production et leur obsolescence rapide sont fortement polluantes. Quant à ceux qui avancent l’argument de la gratuité des médias numériques, il leur est répondu que si l’on calcule le coût des appareils numériques et des abonnements internet et téléphoniques, ceux-ci sont tout simplement encore inabordables pour une partie de la population.

«Si on s’en va vers le numérique y-a-t-il une partie de la population qu’on va exclure, qui n’aura plus accès à l’information parce qu’elle en a pas les moyens?, questionne un répondant. Est-ce que tout le monde va être obligé de s’acheter une tablette pour avoir les nouvelles?»

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